Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, doit s’exprimer aujourd’hui, dans l’après-midi, au sujet de la contestation contre les mesures sanitaires qui est entrée dans sa troisième semaine et paralyse toujours la capitale fédérale Ottawa et plusieurs postes-frontières avec les Etats-Unis, a annoncé sa porte-parole à l’Agence France-Presse. Sous pression, M. Trudeau avait déclaré vendredi que « toutes les options étaient sur la table » pour mettre un terme à ces occupations « illégales » qui portent préjudice au pays et à son économie. Pour y mettre fin, le premier ministre serait sur le point d’utiliser la loi de 1988 sur les mesures d’urgence. Justin Trudeau va informer les exécutifs provinciaux de sa décision d’y recourir, précise la radiotélévision publique, citant des sources anonymes. Ce texte autorise à titre temporaire le gouvernement fédéral à prendre des mesures extraordinaires de sécurité en situation de crise nationale, en tout point du pays.
Ce texte n’a été utilisé qu’une seule fois en temps de paix, par le père de Justin Trudeau, Pierre Trudeau, alors lui-même premier ministre, durant la « crise d’octobre » en 1970 au Québec, mais aussi durant les deux guerres mondiales, sous un autre nom. Le gouvernement de M. Trudeau n’a toutefois pas l’intention de recourir à l’armée, selon la CBC. Les manifestations à Ottawa contre les mesures de lutte contre l’épidémie de Covid-19 sont entrées dans leur troisième semaine, même si le blocage du principal poste-frontière entre le Canada et les Etats-Unis, à Windsor, dans l’Ontario, a pris fin dimanche.
Je partage ci-dessous la traduction française d’un article de Brian Lilley qui fut publié aujourd’hui dans le Toronto Sun. Je n’y apporterai aucun commentaire personnel. Brian Lilley est chroniqueur, auteur, animateur d’émissions de télévision et était le correspondant principal du défunt Sun News Network à Ottawa, couvrant la Colline du Parlement. Il a travaillé à la radio, à la télévision et dans la presse écrite partout au Canada. Ancienne émission de radio sur 580 CFRA à Ottawa, il est actuellement chroniqueur politique provincial et national pour le Toronto Sun.
Pourquoi et comment Trudeau peut invoquer la Loi sur les mesures d’urgence
Quelqu’un peut-il dire que n’importe quel palier de gouvernement contrôle effectivement notre capitale nationale?
► Par Brian Lilley (14 février 2022)
Dimanche soir, le premier ministre Justin Trudeau a convoqué une réunion d’urgence du cabinet pour discuter de l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. Lundi matin, il doit s’entretenir avec tous les premiers ministres des provinces et des territoires sur cette même question. Certaines personnes demandent ce qui a pris si longtemps et d’autres demandent comment cela peut être justifié. Trudeau a-t-il peur des châteaux gonflables, c’est la question que les partisans de la manifestation d’Ottawa posent avec moquerie. Alors que le gouvernement fédéral s’apprête à invoquer cela, regardez au-delà des châteaux gonflables, regardez au-delà d’Ottawa et prenez une vue d’ensemble pour comprendre comment et pourquoi ils le feront.
Le gouvernement fédéral a perdu le contrôle de plusieurs passages frontaliers clés au cours de la semaine dernière. Le pont Ambassador à Windsor est enfin ouvert après avoir été bloqué pendant une semaine, mais le passage à Coutts, en Alberta, reste fermé, tout comme le passage à Emerson, au Manitoba. Le passage à niveau de l’autoroute du Pacifique reliant Surrey, en Colombie-Britannique et Blaine, dans l’État de Washington, est non seulement fermé, mais ce week-end, des véhicules de convoi ont franchi une barricade de la GRC. Ensuite, nous nous tournons vers Ottawa.
Quelqu’un peut-il dire que n’importe quel palier de gouvernement contrôle effectivement notre capitale nationale ?
Une opération sous faux drapeau se prépare-t-elle au Canada ? Comme le précise Abraham Blondeau, la GRC a également été prise en flagrant délit de « fabrication de terrorisme » à plusieurs reprises.
Malgré le soutien du gouvernement de l’Ontario et du gouvernement fédéral, le Service de police d’Ottawa n’a pas été en mesure de contrôler la situation entourant la colline du Parlement et se répandant dans les quartiers résidentiels. Ni le maire Jim Watson ni le chef de la police Peter Sloly ne se sont mobilisés pendant cette crise – c’est hors de leur contrôle.
► Le premier ministre Justin Trudeau commente la réponse fédérale aux manifestations – 14 février 2022 – 16h30
Ceux qui soutiennent le convoi disent que ce qui se passe à Ottawa n’atteint pas le niveau d’une urgence nationale telle que définie dans la loi. Le gouvernement fédéral a évidemment un point de vue différent et s’il invoque la Loi sur les mesures d’urgence, il combinera ce qui se passe à Ottawa avec les blocages des passages frontaliers. Ce à quoi je m’attends, c’est que le gouvernement fédéral invoque la loi en invoquant des « menaces à la sécurité du Canada ». Cela est défini comme « l’espionnage ou le sabotage qui est contre le Canada ou qui est préjudiciable aux intérêts du Canada ou les activités dirigées vers ou à l’appui d’un tel espionnage ou sabotage ».
C’est une voie qu’ils pourraient emprunter, il y a d’autres options en vertu de la loi.
Ce qu’ils souligneront, c’est que la sécurité du Canada et son bien-être commercial et économique sont menacés par ce mouvement de protestation, qui a établi son camp sur la Colline du Parlement et qui bloque également les passages frontaliers. Ils invoqueront également le financement étranger du mouvement de protestation et l’implication d’acteurs étrangers comme justification.
Nous savons qu’il y a eu des Américains, et probablement d’autres, qui ont fait des dons aux efforts de collecte de fonds du convoi. Les Américains ont également participé aux manifestations à Ottawa et ailleurs. L’une des justifications pour déclarer une situation d’urgence qui constitue une menace pour la sécurité du Canada est « les activités influencées par l’étranger au Canada ou liées au Canada qui sont préjudiciables aux intérêts du Canada et sont clandestines ou trompeuses ou impliquent une menace pour quiconque ». Cette définition d’une urgence peut facilement et clairement être satisfaite ici du point de vue du gouvernement. Les manifestants peuvent prétendre que tout cela est faux, peu importe, le gouvernement est prêt à agir.
Si Trudeau va de l’avant en invoquant la loi, il n’a pas besoin de la présenter au Parlement avant la semaine prochaine, elle peut entrer en vigueur aujourd’hui. Ce que cela signifiera sur le plan pratique reste à voir – cela ne signifie pas qu’il déploie l’armée, bien que ce soit une option en vertu de la Loi sur la défense nationale. Il y aura beaucoup de débats sur la nécessité d’invoquer les pouvoirs fédéraux ici, mais une chose est claire : politiquement, Trudeau a des problèmes avec le public à cause de tout cela. Alors que le maintien de l’ordre à Ottawa peut incomber à la ville et à la police locale, le public regarde une manifestation de masse avec le Parlement en toile de fond et il perd patience.
Un nouveau sondage d’Angus Reid montre que 72 % des Canadiens disent qu’il est temps pour les manifestants de rentrer chez eux et que seulement 22 % disent qu’ils devraient rester sur place. Pendant ce temps, le public blâme Trudeau, 65 % d’entre eux affirmant que le premier ministre a aggravé les choses avec ses paroles et ses actions.
Le monde regarde. Plus important encore pour Trudeau, les Canadiens regardent et ils n’aiment pas ce qu’ils voient à travers le pays.
« Bonjour Guy. Merci pour votre engagement et votre intégrité - et votre si belle façon d'écrire le Français. »
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En tant qu’auteur et chroniqueur indépendant, Guy Boulianne est membre du réseau d’auteurs et d’éditeurs Authorsden aux États-Unis, de la Nonfiction Authors Association (NFAA), ainsi que de la Society of Professional Journalists (SPJ). Il adhère de ce fait à la Charte d’éthique mondiale des journalistes de la Fédération internationale des journalistes (FJI).