L’origine de la famille de Bouillanne [1]

Publié dans la Gazette de l’Ours, No.47, 13 novembre 1999 : En lisant les différents numéros de la « Gazette de l’Ours », de 1990 à nos jours, je me suis aperçu que les recherches sur nos origines se sont arrêtées à l’an 1245 et qu’elles semblent bloquées à ce fameux cartulaire de Léoncel. Cela est tout à fait normal, puisque nous n’avons pas réellement compris le sens de la légende. Jacques Bouillanne l’a écrit: « Dans notre cas, la légende s’est emparée de l’histoire et lui a volé un événement bien antérieur » (Gazette de l’Ours, No. 28, 15 novembre 1994).

Mais qu’est-ce qu’une légende ? Une légende est un récit qui relate un fait réel très ancien, souvent déformé par le temps et par l’imagination populaire. Il faut donc découvrir la vérité qui se cache sous le symbole et l’allégorie. C’est ce que nous tenterons de faire.

Selon moi, le personnage du Dauphin est un élément qui s’est ajouté tardivement à notre récit, sans doute vers le XVe siècle. Comme l’a si bien expliqué Michel Wullschleger, le fils de Charles VII chargea un de ses conseillers de rédiger « le registre delphinal » qui tenait à ses yeux de « bréviaire des anciens droys, honneurs et prérogatives du Dauphiné » : « Il y eut donc comme une seconde reconnaissance des titres de noblesse en Dauphiné accordée par le futur Louis XI, c’est-à-dire par un des grands rois de notre histoire (…). Peut-être cette sorte de transport de la noblesse delphinal, après celui du Dauphiné explique-t-il la place tenue par Louis dans la mémoire collective et dans la légende » (Gazette de l’Ours, No. 28, 15 novembre 1994, p. 1).

Cette fixation sur le Dauphin nous a conduit sur deux mauvaises voies.

La légende dit que nos deux héros (peut-être sont-ils les fils d’un seul héros!) ont sauvé des griffes d’un ours blessé un haut personnage. Pourquoi ce haut personnage serait-il Louis II, fils de Charles VII ? Pourquoi ne s’agirait-il pas de Louis II, fils de Charles le Chauve ? Voilà qui serait intéressant!

Notre héros n’aurait pas sauvé Louis des griffes d’un ours « animal », mais bien d’un ours « humain », c’est-à-dire Bernard II Plantevelue, marquis de Gothie.

Louis II le Bègue
Louis II le Bègue

Bernard Plantevelue, c’est Bernard « Patte Velue »… autrement dit Patte d’Ours ! Celui-ci fomenta une révolte contre Louis II le Bègue et entraîna à sa suite une bonne partie de la noblesse occitane, dont plusieurs membres de sa famille. Parmi ceux-ci on retrouvait le comte de Roussillon Miron, le comte de Barcelone Wilfred le Velu (décidément!) et le vicomte de Nîmes Ursus (« ours » en latin).

En 879, plusieurs des insurgés abandonnèrent Bernard II de Gothie dans sa révolte personnelle. D’autres changèrent tout simplement de camp et défendirent Louis II avec autant de vigueur. C’est probablement ce que fit Ursus lorsqu’il s’associa avec le nouveau roi de Provence et de Bourgogne, Boson.

Plusieurs documents confirment l’existence de cet Ursus et il est possible que les familles Bouillanne et Richaud descendent de ce dernier. C’est ce que j’essaierai de démontrer lors de prochains articles.

Il y a une autre raison pour laquelle il était impossible, jusqu’à maintenant, de trouver des documents authentifiant l’ancienneté de notre lignage. C’est qu’en 1245, le Valentinois et le Diois ne faisaient pas partie du Dauphiné, mais bien du Marquisat de Provence, et ce marquisat appartenait aux comtes de Toulouse.

En 1125, Raimond-Béranger III, comte de Barcelone et époux de Douce de Gévaudan (descendante de Boson), et Alphonse Jourdain, comte de Toulouse et époux d’une autre héritière, Étiennette, se partagèrent la Provence. Le premier reçu les terres entre Rhône, Durance, Alpes et la mer, le deuxième les terres au nord de la Durance, Avignon et quelques villes restant indivises.

Lorsque Raymond VII mourut le 27 septembre 1249, le comté de Toulouse et le marquisat de Provence devinrent l’apanage d’Alphonse de Poitiers et de Jeanne son épouse, fille de Raymond VII. Le Valentinois et le Diois ne furent annexés au Dauphiné que vers les années 1419 et 1426.

La Provence en 1125, divisée en marquisat et comté de Provence et comté de Forcalquier.
La Provence en 1125, divisée en marquisat et comté de Provence et comté de Forcalquier.

Donc, si nous voulons trouver des documents antérieurs au XIVe siècle concernant notre famille, il nous faut nécessairement chercher dans les archives des comtes de Toulouse et non dans celles des Dauphins de Viennois.

Si je n’étais pas si loin de Paris, je me rendrais immédiatement aux Archives Nationales de France. Mais étant présentement dans cette impossibilité, j’invite donc tous ceux et celles qui désirent poursuivre les recherches à prendre contact avec le Conservateur en chef responsable du CARAN, M. Henri Zuber. Celui-ci m’a fait parvenir la quote de plusieurs documents que nous devrions consulter.

Monsieur Zuber nous suggère de prendre connaissance du résultat du dépouillement des fichiers et inventaires des Archives Nationales de France : nous pouvons y trouver dans les séries P et PP des inventaires spécifiques à la Chambre du Languedoc pour les années 1307 à 1786, dans la série 0/1, J et JJ des éléments relatifs aux comtes de Provence et de Toulouse. De plus, il nous engage à consulter en salle des inventaires du CARAN les microfilms du fichier Douet d’Arcq qui nous permettront de retrouver par les noms de personnes et de lieux des éléments susceptibles de nous intéresser. Ce fichier regroupe les séries J, K, L et M et son classement est alphabétique.

À partir de la consultation de ces sources, il nous appartiendra de procéder à l’examen de ces cartons pour y retrouver éventuellement la trace des documents qui nous intéressent. En ce qui concerne les Bouillanne, j’invite les chercheurs éventuels à scruter les noms de Bolanicis, de Boilanicis, de Abolen et même de Bollo. J’expliquerai pourquoi ultérieurement. Dans l’intérêt de tous, les découvertes qui seraient réalisées lors de telles recherches devraient être communiquées et publiées dans les plus brefs délais.

Voici la quote des documents à consulter :

P – CHAMBRE DES COMPTES DE PARIS :

P580 à 598. Languedoc. Transcritsd’hommages et aveux et de dénombrements. 1307-1670.
P1143. Languedoc. Inventaire d’hommages et aveux. 1389.
P1114 à 1152. Languedoc. Inventaire d’hommages et aveux expédiés par la Chambre de Languedoc. 1419-1650.

PP ANCIENS INVENTAIRES DE LA CHAMBRE DES COMPTES :

PP45. Inventaire des hommages et aveux de la Chambre de Languedoc. 1374-1662.
PP46. Inventaire des hommages et aveux de la Chambre de Languedoc, faisant suite au précédent, 1618-1786.

J LAYETTES: GOUVERNEMENTS :

J303 à 330b. Toulouse I-XXI (ancien coffre): comtes de Toulouse, Alphonse de Poitiers et leurs domaines et vassaux; croisade contre les Albigeois et traité de Paris de 1229; diverses régions du Languedoc. (767) 1080-1353 (1432).

J SUPPLÉMENT 1: GOUVERNEMENTS :

J877-878 à 880. (877) Titres extraits des archives de la sénéchaussée de Toulouse, 1396-1415 (1702).
J890. Notamment: Simon et Amaury de Montfort, comtes de Toulouse; Figeac. 1209-XIVe siècle.

SÉRIE J TRÉSOR DES CHARTES :

JJ13. Cartulaire (milieu XIIIe siècle) concernant la croisade contre les Albigeois et l’administration du comté de Toulouse sous Simon et Amaury de Montfort. (100Nos). 1209-1222 et 1224.

0/1 MAISON DU ROI :

0/13785 à 3789. Maison des enfants du Dauphin, petit-fils et petites-filles de Louis XV: duc de Bourgogne, duc d’Aquitaine, duc de Berry puis Dauphin (Louis XVI), comte de Provence. 1753-1792.

Dans un prochain article, j’apporterai des éléments nouveaux concernant le vicomte de Nîmes Ursus de qui descendraient, selon mes recherches, les de Richaud et les de Bouillanne. Il faut défricher la forêt pour trouver la source. C’est ce que nous ferons.

Anthologie2020PUB007

Carole Lavoie
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« Ma profonde reconnaissance d'avoir presque fait revivre Rosa Koire dont les avertissements résonnent tellement fort. »

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