Par Maurice Rousset (La Gazette de l’Ours, février 1992) : Du 27 mai au 4 juin 1940, l’opération Dynamo confiée au vice-amiral britannique Ramsay consista à réembarquer vers l’Angleterre, par le port et les plages de Dunkerque, le corps expéditionnaire britannique et une partie des troupes françaises menacées d’encerclement par l’avance allemande. En effet, 342,000 soldats alliés furent évacués dont 338,000 sur l’Angleterre et 3,936 sur le Havre et Cherbourg.
Malgré les bombardements de la Luftwaffe et l’action des batteries côtières, cette opération sans précédent fut une réussite.
À Douvres l’amiral Ramsay, à Dunkerque l’amiral Abrial et le contre amiral Platon tinrent à chacun à leur poste un rôle essentiel dans ce succès.
C’est dans ce contexte confus et dramatique qu’apparaît la figure du commandant Boyer de Bouillane. Né en 1885 à Valence d’une famille de magistrats, après ses études il entre dans la marine. Enseigne de vaisseau sur “Le Chasseur” en 1914, sa carrière se poursuit à Toulon, Brest et Nantes, dans les services de transmission. Promu aide de camp de l’amiral Debon de 1917 à 1919, il participe à la campagne de Syrie. Il s’y distingue. Il est fait Chevalier de la Légion d’honneur. Après cette campagne, il donne avec regret sa démission pour aller travailler dans le privé et se rapprocher de sa nombreuse famille.
Lorsque la guerre éclate en 1939, il demande immédiatement à reprendre du service et se retrouve à Dunkerque, affecté à la Direction des Transmissions Radio-Télégraphiques. Mais avant de rejoindre son poste, il décide d’éloigner de Paris sa femme et ses dix enfants qui se fixent à Meylan, près de sa soeur, dans la maison de Madame Des Francs, chemin de la Ville. C’est là qu’il passera ses dernières permissions en février et Pâques 1940.
Dunkerque 4 juin 1940. Dernier jour des opérations de repli vers l’Angleterre. Les troupe anglaises et françaises accomplissent des efforts surhumains pour évacuer un maximum de soldats. Le capitaine de frégate Boyer de Bouillane jusqu’au dernier moment s’efforce avec courage et ténacité de rétablir les liaisons de commandement sans se soucier des bombardements continus. Tout espoir étant perdu de tenir Dunkerque, il embarque avec ses hommes sur le caboteur l’Émile Deschamps pour tenter de rejoindre l’Angleterre. Son bateau est mitraillé et coulé : succession de tragédies.
Boyer de Bouillane prend place sur une vedette qui est, à son tour, détruite. Blessé, il est rattrapé par une autre vedette qui sombre sous le feu ennemi, à l’approche des côtes anglaises.
Le corps du capitaine de frégate Boyer de Bouillane fut retrouvé et rapatrié en France. Il repose à Marcois-lès-Eaux en Ardèche, où il possédait une maison de famille provenant de son épouse. De nombreux hommages lui furent rendus notamment par l’amiral Abrial et l’amiral Platon.
Comme c’est à Meylan qu’il vécut ses dernières joies familiales, comme c’est à Meylan que sa famille apprit le 6 juin 1940 sa mort glorieuse et comme il lui reste ici des attaches familiales, notamment sa soeur Geneviève de Courville, aujourd’hui âgée de 94 ans [en 1992], le nom de ce grand soldat figure aujourd’hui sur la plaque 39/45 des Meylanais morts pour la France.
[Le grade de capitaine de frégate dans la marine correspond à celui de Lieutenant-Colonel dans l’armée de terre].
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En tant qu’auteur et chroniqueur indépendant, Guy Boulianne est membre du réseau d’auteurs et d’éditeurs Authorsden aux États-Unis, de la Nonfiction Authors Association (NFAA), ainsi que de la Society of Professional Journalists (SPJ). Il adhère de ce fait à la Charte d’éthique mondiale des journalistes de la Fédération internationale des journalistes (FJI).