La province de Québec est en pleine période électorale. Le 3 octobre prochain, les gens renouvelleront le mandat désastreux de la Coalition Avenir Québec (CAQ) de François Legault, ou bien se choisiront un nouveau gouvernement pour les diriger, en espérant que celui-là fera mieux que le précédent. La population devra faire une sélection entre le Parti québécois de Paul St-Pierre Plamondon, le Parti libéral de Dominique Anglade, le parti communiste Québec solidaire du prête-nom Nicolas Chatel-Launay (le « chef caché » de ce parti, Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé n’étant que de simples porte-paroles), le Parti conservateur du Québec du libertarien Éric Duhaime, ou tout autre parti inscrit sur la liste électorale du Directeur général des élections. Personnellement, je me définis comme un véritable marginal, car j’ai toujours avidement recherché la « véritable vérité », et en ce sens je n’ai jamais cherché à suivre la vague populaire de la société. Je n’ai jamais hésité à marcher à contre-sens, au risque de ne me faire aucun ami.
Or, je suis au regret de vous dire que la province de Québec a été piratée (« hacked ») depuis longtemps, c’est-à-dire depuis le début de la « Révolution tranquille » qui permit aux conjurateurs de mettre en place une gouvernance sans entraves. Ceci donna les pouvoirs aux députés de faire et de défaire les lois au gré de leurs humeurs et de leurs désirs, comme on peut le voir dans ce débat surréaliste entre la députée du PLQ, Marwah Rizqy, et la vice-première ministre du Québec, Geneviève Guilbault. Mais comment cela a-t-il été rendu possible ? Tout simplement par l’abolition du Conseil législatif du Québec qui prit effet le 31 décembre 1968, sans même avoir créé au préalable un organisme pour protéger la constitution. Jusque là, la Chambre haute avait le pouvoir de modifier ou de rejeter les projets de loi, les protégeant contre une Assemblée législative dominée par la majorité. Mais désormais, la nouvelle Assemblée nationale assumait tous les pouvoirs qui sont attribués à la Législature du Québec.
La voie vers l’autoritarisme était désormais pavée et nous verrons ci-dessous que tous les partis politiques — quels qu’ils soient — petits ou grands — sont actuellement irréguliers et illégitimes puisqu’ils sont créés, qu’ils existent et qu’ils se présentent au sein d’un système politique frauduleux et inconstitutionnel. On pourrait peut-être m’objecter que je ne connais rien en politique pour déclamer une telle affirmation ! Or, je ne suis pas la première personne à émettre une telle idée. Loin s’en faut. Le 14 décembre 2018, les journalistes Marco Bélair-Cirino et Dave Noël publiaient un article dans Le Devoir, avec le titre évocateur : « Le Conseil législatif du Québec, rempart contre l’autoritarisme ».
Avec l’abolition de la Chambre haute, le Québec a perdu au change, dit l’ancien député Gérald Harvey dans un entretien avec le journal Le Devoir « Le Conseil législatif était composé de vieux routiers, de vieux législateurs, de gars qui avaient été formés depuis très longtemps au débat. Moi, je ne l’aurais pas aboli. Je l’aurais gardé comme sécurité ». Le maintien d’une Chambre haute aurait permis de retenir des parlementaires de valeur, estime le nonagénaire. Pour l’ancien député libéral, un Conseil législatif serait particulièrement utile depuis l’élection d’un gouvernement caquiste ne comptant que deux ministres expérimentés, dont le premier ministre. L’ancien avocat, Michel Lebrun, dit dans la conférence ci-dessous : « Vous comprenez que s’il n’y a seulement qu’une Chambre, et puis que les gens changent à tous les quatre ans, c’est beaucoup plus facile de faire de la corruption. C’est beaucoup plus facile de faire de la corruption à une Chambre, convaincre une personne qu’en convaincre beaucoup plus. »
« On croit habituellement que la présence d'une Chambre haute formée de gens relativement âgés et possédant une expérience politique ou 1égislative souvent remarquable peut apporter un frein nécessaire parfois aux élans impétueux de l'assemblée de députés. On invoque aussi le fait qu'une nation évoluée a besoin de plusieurs représentations pour que soient plus exactement traduites la complexité de ses opinions et la variété de ses aspirations. Aussi une Chambre unique constitue-t-elle un parlement plus fragile et à titre d'exemple l'on rapporte que le premier président de la seconde république espagnole Alcada Zomora, a attribué la chute de cette dernière à l'absence de sénat. Au reste les membres de la Chambre haute, qui siègent dans une atmosphère plus calme et moins politique, peuvent contribuer à assurer une meilleure qualité à la 1égislation, tant au point de vue technique qu'au point de vue de sa conformité aux besoins sociaux, et par là à donner une plus grande stabilité aux lois. » — François Chevrette, (1963) 13:46 Thémis 85
Le Conseil législatif du Québec et la législature bicamérale
Le Conseil législatif du Québec était la Chambre haute non élue de la législature bicamérale de la province canadienne de Québec de 1867 à 1968. Le professeur de droit public, François Chevrette, écrivait en 1963 : « Le conseil législatif, nous diront les historiens, n’est pas né en 1791 [avec l’Acte constitutionnel]. C’est en effet l’Acte de Québec de 1774 qui l’établit comme un organe législatif devant travailler en concurrence avec le gouverneur. Pourtant au point de vue constitutionnel, c’est avec l’installation du régime parlementaire dans la province du Bas-Canada que débute son histoire » L’Assemblée législative était la Chambre basse élue.
L’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867 (BNA Act, Art. 71 ä 79), inaltéré sur ce point depuis 1867, en reconstituant le Conseil législatif, attribuait à ses 24 membres nommés à vie par le gouvernement, des pouvoirs aussi étendus qu’à l’assemblée élective pour l’adoption d’une loi. Il composait, sur un pied d’égalité avec le lieutenant-gouverneur, l’organe législatif, organe suprême dans l’Ëtat. Comme l’a noté Jean-Charles Bonenfant, cette situation caractérisait le Québec demeuré en 1968 l’un des rares endroits au monde où le bicaméralisme était resté à l’état pur. Cette Chambre aristocratique possédait en effet le pouvoir d’empêcher indéfiniment l’adoption de tout projet de loi. Effectivement, le conseil n’avait pas exercé ce veto radical très souvent depuis 1867, mais quelques occasions célèbres demeurent toutefois en mémoire.
Le conseil avait le droit de présenter des projets de loi, sauf de nature financière, et d’amender ou de veto les projets de loi adoptés par l’Assemblée législative. Son orateur, connu en français sous le nom d’orateur, était de droit membre du Cabinet, et ses membres pouvaient servir de ministres ou même de premier ministre. Deux premiers ministres du Québec, Charles-Eugène Boucher de Boucherville et John Jones Ross sont membres du Conseil législatif. Les membres étaient initialement nommés à vie. En 1963, la règle a été modifiée pour obliger les membres à prendre leur retraite à 75 ans, mais cela ne s’appliquait pas aux membres déjà nommés. En l’occurrence, le changement est resté entièrement théorique puisque le conseil a été aboli avant qu’il ne puisse être appliqué à qui que ce soit.
Le 31 décembre 1968, le Conseil législatif a été aboli et l’Assemblée législative du Québec a été rebaptisée Assemblée nationale. En conséquence, le Québec a maintenant une législature monocamérale. Le gouvernement de l’Union nationale du premier ministre par intérim Jean-Jacques Bertrand a adopté la loi, connue sous le nom de « projet de loi 90 », pour mettre en œuvre le changement. Les gouvernements précédents avaient fait des tentatives infructueuses pour éliminer la Chambre haute. En fait, la première tentative remonte à Félix-Gabriel Marchand, à la fin du XIXe siècle. Le Québec a été la dernière province canadienne à abolir sa Chambre haute. Au moment de sa dissolution, elle comptait 15 membres de l’Union nationale et 9 membres du Parti libéral.
« Le pouvoir entre les mains d’une majorité simple à l’Assemblée législative n’offre de garantie pour personne. Nous avons eu dans le passé et nous avons encore tous les jours, de très nombreux exemples qui démontrent qu’en général la partisanerie joue carrément contre nos meilleurs intérêts. » — Patrice Tardif, 12 décembre 1968
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