Le Centre de justice est déçu de la conclusion du commissaire Rouleau selon laquelle l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence était de mise

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Je partage ci-dessous la déception du Centre de justice (Justice Center) concernant la conclusion du commissaire Paul S. Rouleau selon laquelle l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence était justifiée dans le cadre du Convoi de la Liberté (ou Convoi des camionneurs). Je partage aussi le commentaire de l’avocat John Carpay, président du Centre de justice, qui met en évidence que la preuve contredit la conclusion du Rapport Rouleau. John Carpay est né aux Pays-Bas et a grandi en Colombie-Britannique. Il a obtenu son baccalauréat en sciences politiques de l’Université Laval à Québec et son LL.B. de l’Université de Calgary. Parlant couramment l’anglais, le français et le néerlandais, John a servi la Fédération canadienne des contribuables en tant que directeur de l’Alberta de 2001 à 2005, plaidant pour une baisse des impôts, moins de gaspillage et un gouvernement responsable. Admis au Barreau en 1999, il a défendu la liberté et la primauté du droit dans des affaires constitutionnelles partout au Canada.

En tant que fondateur et président du Centre de justice pour les libertés constitutionnelles, John a consacré sa carrière juridique à la défense des libertés constitutionnelles par le biais de litiges et de l’éducation. Il considère comme un privilège de défendre des clients courageux et de principe qui prennent de grands risques – et font d’énormes sacrifices personnels – en résistant aux demandes injustes des autorités gouvernementales intolérantes. En 2010, John a reçu le Pyramid Award for Ideas and Public Policy en reconnaissance de son travail de plaidoyer constitutionnel et de son succès dans la création et la gestion d’une organisation à but non lucratif pour défendre les libertés des citoyens.


Rapport Rouleau : la preuve contredit la conclusion

Par John Carpay, le 23 février 2023

« J’ai conclu qu’en l’espèce, le seuil très élevé d’invocation [de la Loi sur les mesures d’urgence] était atteint. Je l’ai fait avec réticence. » Ainsi conclut le juge Paul Rouleau dans un rapport dépassant les 2 000 pages. Les motifs de sa réticence sont très solides. En fait, la preuve appuie sa réticence plus qu’elle n’appuie sa conclusion.

Pour que la déclaration d’un état d’urgence d’ordre public soit justifiée, le juge Rouleau précise que toutes les conditions suivantes doivent être remplies :

  • Il y avait une situation urgente et critique de nature temporaire qui mettait gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens;
  • L’état d’urgence découlait d’activités visant à menacer ou à recourir à des violences graves contre des personnes ou des biens dans le but d’atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique ;
  • L’urgence était d’une telle ampleur ou nature qu’elle dépassait la capacité ou l’autorité d’une province à y faire face;
  • L’urgence ne pouvait être traitée efficacement par aucune autre loi fédérale; et
  • L’urgence a nécessité la prise de mesures temporaires spéciales.

Les preuves présentées à la Commission d’urgence de l’ordre public à l’automne 2022 ne confirment pas ces exigences légales.

Premièrement, bien que certains résidents d’Ottawa aient certainement été incommodés par la manifestation pacifique, ces inconvénients ne constituent pas une mise en danger « sérieuse » de la vie, de la santé ou de la sécurité de l’ensemble des Canadiens.

Deuxièmement, alors que les manifestants cherchaient un objectif politique ou idéologique (mettre fin aux politiques de vaccination obligatoire et aux confinements), il n’y avait aucune preuve crédible montrant « la menace ou l’utilisation de violences graves contre des personnes ou des biens ».

Troisièmement, si l’Ontario n’a pas traité la manifestation de manière appropriée, cela ne signifie pas que la province n’avait pas « la capacité ou l’autorité » pour gérer la manifestation. Comme le dit le juge Rouleau : « La réponse au Convoi de la Liberté a impliqué une série d’échecs de la police. Certains des faux pas étaient peut-être minimes, mais d’autres étaient importants et, pris ensemble, ils ont contribué à une situation qui a échappé à tout contrôle. » L’incompétence du gouvernement n’est pas la même chose que le manque de capacité ou d’autorité du gouvernement.

Quatrièmement, les gouvernements municipaux (Ottawa) et provinciaux (Ontario) n’ont pas utilisé les outils d’application de la loi qui étaient à leur disposition : (1) émettre des contraventions pour le bruit, le stationnement et les infractions au code de la route ; (2) enlever et entreposer les camions qui gênaient ou bloquaient le mouvement normal et raisonnable de la circulation sur les routes ; et (3) obtenir une injonction, en utilisant la Loi sur la gestion des situations d’urgence et la protection civile de l’Ontario , qui permet à la police d’ordonner aux individus de cesser de perturber l’activité économique ordinaire, de se disperser et de déplacer leurs véhicules.

Cinquièmement, la police aurait pu engager des poursuites pénales contre des manifestants pour méfait, intimidation, désobéissance à une ordonnance du tribunal, agitation ou vagabondage… si les manifestants avaient commis l’un de ces crimes. Mais avant l’invocation d’une « urgence nationale » le 14 février 2022, il n’y avait pratiquement aucune accusation criminelle portée contre les participants du Convoi de la Liberté.

Vous pouvez télécharger le Rapport intégral de la Commission sur l’état d’urgence.

Bref, la vie, la santé et la sécurité des Canadiens n’étaient pas sérieusement menacées. Il n’y a pas eu de « menace ou de recours à des violences graves contre des personnes ou des biens », à part les vandales d’Antifa qui ont coupé les lignes aériennes et crevé les pneus des véhicules des camionneurs. Les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux ne manquaient pas de « capacité ou autorité » pour gérer la manifestation, mais au lieu de cela, ils n’ont pas utilisé les outils qui se trouvaient dans leur boîte à outils.

Comment et pourquoi le juge Rouleau a-t-il alors conclu qu’une manifestation pacifique dans une ville pouvait constituer une « urgence nationale » ? Cela restera à jamais un mystère, mais son long rapport laisse entrevoir quelques indices.

Tout au long de son rapport, le juge Rouleau affirme à plusieurs reprises que ceux qui s’opposent aux restrictions de Covid ont été fortement influencés par la « mésinformation » et la «désinformation». Que les gouvernements et les médias puissent diffuser une « mésinformation » accidentelle et une « désinformation » délibérée n’est pas sérieusement considéré comme possible.

Lorsqu’il qualifie le Covid de « crise de santé publique sans précédent », le juge Rouleau accepte évidemment le récit des gouvernements et des médias financés par le gouvernement, ignorant le fait que l’impact du Covid sur l’humanité diffère peu de la grippe asiatique de 1957-1958 et de la grippe de Hong Kong de 1968-1969. Ce qui était “sans précédent” n’était pas le Covid mais une toute nouvelle expérience consistant à enfermer des populations entières de personnes en bonne santé pendant des mois.

Le juge Rouleau utilise avec désinvolture des termes tels que « violence », « harcèlement » et « intimidation » sans les définir ni expliquer à quoi une telle conduite pourrait faire référence, précisément. Il se plaint de conduite « illégale » et « non pacifique » sans faire spécifiquement référence à des violations réelles du Code criminel. Cette utilisation lâche du langage ne tient pas compte de la distinction cruciale entre la conduite criminelle et la conduite qui fait que certaines personnes se sentent bouleversées parce qu’elles voient ou entendent des opinions avec lesquelles elles sont fortement en désaccord.

Le juge Rouleau semble ignorer le fait que quelques jours après l’arrivée des camionneurs à Ottawa, ils ont eux-mêmes imposé une période de silence obligatoire de 20 h à 8 h tous les jours. Eux aussi ne voulaient pas entendre les klaxons lorsqu’ils essayaient de dormir. Tout en affirmant que « personne ou groupe n’a parlé pour tous les manifestants, ni même la plupart des manifestants » et qu’« il n’y a pas eu de véritable organisation centrale des manifestations au cours des trois semaines », il blâme toujours Chris Barber et Tamara Lich pour avoir échoué d’une manière ou d’une autre à arrêter les klaxons de certaines personnes qui n’ont pas tenu compte de la restriction auto-imposée par les camionneurs.

Affirmant que la situation à Ottawa était dangereuse et chaotique, le juge Rouleau cite le blocage potentiellement dangereux des voies d’urgence sur la rue Kent. Pourtant, il ne reproche pas au gouvernement de ne pas avoir utilisé les outils d’application de la loi disponibles pour nettoyer cette rue. En d’autres termes : l’incompétence du gouvernement justifie en quelque sorte l’utilisation de la Loi sur les mesures d’urgence pour mettre un terme violent à une manifestation pacifique.

Le juge Rouleau se plaint d’un nombre inconnu d’individus « controversés » et « extrêmes » qui ont adopté des opinions « répréhensibles », comme si cela était juridiquement pertinent. Dans un pays comme le Canada, qui est censé être fondé sur la primauté du droit, la seule chose qui compte au sujet des manifestants est leur comportement, et non si leurs opinions sont populaires ou impopulaires.

Le juge Rouleau explique également qu’il a été profondément troublé par les manifestations non violentes qui ont « ciblé » l’autobus de campagne du premier ministre Trudeau lors de l’élection de 2021. Certains d’entre eux étaient (halètement !) des manifestants « anti-vaccins » qui tenaient des drapeaux et des banderoles, utilisaient des porte-voix, criaient et, dans certains cas, chahutaient même M. Trudeau. Comme la présence ou l’absence de personnes ayant des opinions « extrêmes », cela n’a aucune importance juridique pour savoir si une répression violente contre les manifestants pacifiques du Convoi de la Liberté en 2022 était justifiée ou non.

Heureusement, le juge Rouleau a déclaré que « rien dans le rapport ne lie de quelque manière que ce soit les tribunaux qui peuvent entendre des contestations judiciaires de l’utilisation de la Loi ». Cela apporte une clarté utile à la Cour fédérale, qui entend une action visant à faire déclarer que le Premier ministre a agi illégalement lorsqu’il a déclaré qu’une manifestation pacifique dans une ville constituait une « urgence nationale ».


Le Centre de justice est déçu de la conclusion du commissaire Rouleau selon laquelle l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence était justifiée — (texte publié le 17 février 2023)

Ottawa, Ontario : Le Centre de justice pour les libertés constitutionnelles est déçu par le rapport de la Commission sur l’état d’urgence (CEDU), qui a été déposé devant le Parlement aujourd’hui. Les sept semaines d’audiences ont montré que les manifestations à Ottawa et dans tout le pays étaient perturbatrices, mais extrêmement pacifiques. Les audiences ont fourni des éléments de preuve démontrant qu’ils ne constituaient pas une « menace pour la sécurité du Canada » (au sens où ce terme est défini à l’article 2 de la Loi sur le SCRS). Malgré cela, le rapport du commissaire Paul Rouleau a conclu que l’invocation par le gouvernement de la Loi sur les mesures d’urgence était justifiée.

En concluant qu’il y avait des motifs raisonnables pour le Cabinet de croire qu’une urgence nationale existait au moment où la Loi a été invoquée, le rapport du commissaire déclare : « Je ne parviens pas facilement à cette conclusion, car je ne considère pas que le fondement factuel de celle-ci soit accablant et je reconnais que les arguments contre cette conclusion sont considérablement solides. » Dans sa déclaration publique d’aujourd’hui, il a ajouté : « Des personnes raisonnables et informées pourraient parvenir à une conclusion différente de celle à laquelle je suis arrivé. »

La CEDU est une commission d’enquête sur l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence par le gouvernement du Canada le 14 février 2022 en réponse aux manifestations à Ottawa et ailleurs au pays. La Loi sur les mesures d’urgence exige qu’une enquête publique soit tenue sur les circonstances de la déclaration d’urgence et sur la pertinence des mesures d’urgence prises en vertu de la Loi. La CEDU a été constituée par décret le 25 avril 2022 et est présidée par le commissaire Paul Rouleau, juge de la Cour d’appel de l’Ontario. La CEDU a tenu sept semaines d’audiences publiques du 13 octobre au 25 novembre 2022, suivies d’une semaine de tables rondes sur les politiques.

Le Centre de justice a obtenu le statut de participant à l’enquête et a été représenté aux audiences de la Commission par les avocats Rob Kittredge et Hatim Kheir.

« À notre avis, le seuil prévu dans la Loi sur les mesures d’urgence n’a manifestement pas été atteint. Laissant de côté la question de savoir si une demande fondée sur l’art. 2 de la Loi sur le SCRS “menace à la sécurité du Canada” existait, il était clair d’après les preuves présentées à la Commission que les protestations auraient pu et auraient été traitées en vertu de la loi existante », a déclaré Rob Kittredge, avocat du Centre de justice lors des audiences de la Commission.

Le Centre de justice a fait valoir que les circonstances ayant conduit à l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence n’atteignaient pas le seuil fixé dans la loi pour une déclaration d’urgence. Afin de déclarer légalement une urgence d’ordre public, la Loi exige qu’il y ait des « menaces à la sécurité du Canada » (au sens donné à ce terme dans la Loi sur le SCRS), si graves qu’elles constituent une « urgence nationale » qui ne peut être efficacement traité en vertu de toute autre loi du Canada.

Le Centre de justice a déposé des observations finales faisant valoir que le gouvernement du Canada n’avait pas démontré que ce seuil avait été atteint et que l’invocation de la Loi était donc illégale.

Le Centre de justice continue de financer la contestation de la déclaration d’urgence actuellement devant la Cour fédérale.

M. Kittredge a ajouté : « Comme le commissaire l’a noté dans sa déclaration publique d’aujourd’hui, “rien dans le rapport n’oblige en aucune façon les tribunaux qui peuvent connaître des contestations judiciaires de l’utilisation de la loi”. Des demandes de contrôle judiciaire de l’invocation de la Loi sont actuellement devant la Cour fédérale, et nous sommes optimistes que les Cours fédérales parviendront effectivement à une conclusion différente. »


Le Centre de justice a déposé des observations finales faisant valoir que le gouvernement du Canada n’avait pas démontré que ce seuil avait été atteint et que l’invocation de la Loi était donc illégale.

Anthologie2020PUB007

Patrice Bouriche
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« Votre force Guy, c’est votre indépendance rendant authentique votre travail de journaliste qui ne subit de facto aucune pression « supérieure ». Continuez à informer comme vous le faîtes ! Les chercheurs de vérité en ont plus que besoin ! Résistance !!! »

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